L’écrivain

Quand je serais grand, je serais écrivain...
Et même plus, je serais écrivain célèbre!
Chacun de mes romans, un par an, sera attendu par mes lecteurs, qui se languiront de mes histoires.
Ils fondront d'impatience pour ma nouvelle œuvre qui les plongera dans un univers inconnu et passionnant.
Et la presse se pavanera devant moi pour avoir une interview, un mot original, une photo.
Bien sûr, je ne donnerais à ces chiens que le strict minimum.
Ils auront des oui ou des non... Au mieux un sourire... mais pas de bons mots pour les valoriser.
Ma personnalité secrète sera mon meilleur atout marketing.
Les autres écrivains envieront ma carrière, en me critiquant, comme il est de coutume dans ce monde.
Ils cracheront sur moi et sur mon œuvre, trop frustrés qu'ils sont de ne pas avoir eu la même bonne idée que moi!
Les jeunes qui débutent essayeront de me toucher afin que je lise leur premier roman.
Je les gratifierais d'un hochement de tête avant de balancer leur manuscrit à la poubelle.
Qu'est-ce qu'ils croient ces jeunes cons? Est-ce que quelqu'un m'a aidé, moi?
Trop las de suivre les recommandations de mon éditeur, je lui dirais d'aller se faire voir chez les Houellebecqs et je créerais ma propre boite d'édition.
J’engagerais un lecteur, pour me choisir des perles que je publierais et qui feront ma fortune.
Je n’aurais même plus besoin d’écrire, seuls mes jugements seront utiles.
Je serais écrivain, comme quand j’en avais rêvé…
Quand je serais grand, je serais écrivain,
Mais pas de ce genre là !